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26/01/2016

Montréal, les femmes, la vie

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J'ai vu en novembre dernier La couleur du jazz, cette très belle exposition qui prend fin ces jours-ci (le 31 janvier) au Musée des Beaux arts de Montréal.

Sur une des toiles, une femme m'a semblé présenter une légère ressemblance avec ma tante Yvette, décédée en 2012, la veille de son 91e anniversaire. J'aimais bien cette tante dont la vie ne fut pas un long fleuve tranquille. Infirmière, célibataire, forte de caractère. Mademoiselle Audrey Fuller, telle que peinte par Randolph S Hewton (image ci-dessus) me fait beaucoup penser à elle, par sa minceur, sa chevelure, sa bouche.

Une de mes amies avait pour sa part noté une étrange ressemblance entre sa propre mère et un autre portrait de femme. Ressemblance bien entendu transmise à cette amie et à ses enfants.

Par ailleurs, j'ai beaucoup aimé cette exposition, accessible et émouvante. Les tableaux vibrent et racontent. Ils racontent la ville, les gens, les événements. Une impression de vie, et un peu de nostalgie aussi, pour ces belles années 20 à Montréal.

L'exposition regroupe des tableaux de membres du Groupe de Beaver Hall, un mouvement artistique au sein duquel il y avait autant de femmes que d'hommes. Leurs choix de sujets et leurs techniques apportèrent un vent de modernité (parfois sévèrement critiqué) dans les arts visuels à l'époque.

Les sujets représentés par différents peintres ont tous un air très sérieux. Le sourire sur les portraits n'était pas de mise. Il n'a été introduit que bien plus tard, sous l'influence d'Hollywood et des photos de stars, dit-on. Il était même de bon ton d'afficher une moue boudeuse, comme le fait cette Jeune fille en robe à pois (1923), peinte par Emily Coonan:

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Il y a aussi de très belles scènes de la vie urbaine, signées notamment par Adrien Hébert, un peintre que j'apprécie depuis fort longtemps. Celle-ci, par exemple, qui représente un secteur bien connu de la rue Sainte-Catherine, au coin Berri, tel qu'il était en 1926:

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Le nom d'Archambault est toujours là, mais il appartient maintenant à Renaud-Bray, les noms des commerces et les façades voisines ont quelque peu changé... et il n'y a plus de tramways...

Il a aussi peint la rue Saint-Denis, ici:

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Enfin voici une vue de la côte du Beaver Hall (rue qui va de la place Philips au square Victoria), peinte par Kathleen Morris

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Pour plus d'information sur l'exposition, on peut lire cet article assez détaillé d'Éric Clément, dans La Presse

04/02/2014

Une revue, des créateurs, des trésors

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(Ozias Leduc: portrait de Florence Bindoff, 1931-1935. © MNBAQ, Collection du Musée national des beaux-arts du Québec)

Ne vous attardez pas au titre, qui peut paraître rébarbatif. Courez au CNE de Jonquière pour voir l'exposition  Vers un renouveau artistique autour de la revue Le Nigog, 1918, présentée jusqu'au 20 avril. Vous serez mis en présence de plusieurs grandes oeuvres, et de quelques chefs-d'oeuvre de l'art québécois.

Le titre désigne le fil conducteur qui a présidé au choix de ces oeuvres: essentiellement, il s'agit d'artistes présentés (sous un jour favorable) par le magazine mensuel Le Nigog, fondé en 1918 et qui dut fermer après la publication de 12 numéros.

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(Napoléon Bourassa, Les petits pêcheurs, vers 1865. © MNBAQ, Collection du Musée national des beaux-arts du Québec)

C'est peu de dire que cette revue "moderniste", qui voulait éveiller l'intérêt et stimuler la curiosité des lecteurs envers la littérature et l'art contemporain fut mal accueillie:

"Proclamant la primauté de la forme sur le sujet comme condition d'un art universel, les rédacteurs en chef se font immédiatement des ennemis. Les régionalistes sont horrifiés : la revendication du formalisme détruit la sérénité avec laquelle ils avaient appuyé la pensée de la société conformiste."

Les toiles et sculptures de ces artistes modernes cne,jonquière,mnbaq,québec,charles gille,ozias leduc,peintres québécois,adrien hébertpour l'époque (début du 20e siècle) ont longtemps dormi dans les voûtes du Musée national des Beaux-Arts du Québec, qui a préparé cette superbe exposition itinérante. Certaines d'entre elles furent très difficiles à retrouver, m'a expliqué le guide qui m'a accueillie au CNE, ajoutant que plusieurs d'entre elles sont montrées au public pour la première fois.

Pas difficile aujourd'hui, en visitant l'exposition, de comprendre pourquoi le nom de leurs créateurs est parvenu jusqu'à nous: ce sont des artistes sérieux, épris de liberté, capables de réflexion et techniquement sûrs d'eux-mêmes. On n'en est pas encore à l'abstraction, mais on peut observer sur leurs toiles des signes (choix des couleurs, attitudes et expression des sujets, perspective, construction) de leur éveil et de leur aspiration à sortir du cadre institutionnel et traditionnel.

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(John Lyman: Corinne, 1919. © MNBAQ, Collection du Musée national des beaux-arts du Québec)

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(Adrien Hébert: Léo-Paul Morin, 1922. © MNBAQ, Collection du Musée national des beaux-arts du Québec)

Du titre de l'exposition, il faut somme toute retenir les mots "renouveau artistique". Et se rappeler que des gens, les rédacteurs du Nigog dans ce cas, ont travaillé fort et affronté les préjugés pour faire progresser la pensée de leur temps.

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(Charles W. Simpson: Falaise de Gaspé © MNBAQ, Collection du Musée national des beaux-arts du Québec)

Ce sont les portraits que j'ai le plus aimés dans cette exposition. Ceux que je présente sur cette page: l'énigmatique Florence Bindoff par Ozias Leduc, l'impertinente Corinne de John Lyman, et le pensif Léo-Paul Morin, par Adrien Hébert, un peintre que j'aime beaucoup, dont l'exposition présente aussi les magnifiques Élévateurs à grains du port de Montréal.cne,jonquière,mnbaq,québec,charles gille,ozias leduc,peintres québécois,adrien hébert

Et aussi Le vieux paysan canadien français de Suzor-Côté et le joueur d'échecs de Charles Gill (le tableau s'intitule Le problème d'échecs).

En entrant dans la salle, on peut admirer  Le pêcheur à la nigogue, reproduction à l'échelle d'une sculpture de Louis-Philippe Hébert installée sur la façade du Parlement de Québec. Une nigogue, ou un nigog comme le titre de la revue, est le harpon traditionnel des amérindiens.