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20/12/2011

Noël, Les Violons, Marie-Nicole...

Chaque année, j'assiste à un concert de Noël. Cette année, c'était spécial: il y avait bien le mot Noël dans le titre de plusieurs oeuvres, mais c'était, tout simplement, un vrai concert de vraie musique. Baroque. Donné par Les Violons du Roy et la contralto Marie-Nicole Lemieux, véritable joyau vocal et musical originaire de Dolbeau au Lac-Saint-Jean.

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(Marie-Nicole Lemieux et Les Violons du Roy. Photo Jeannot Lévesque, Le Quotidien)


L'église Notre-Dame-de-Grâce n'a pourtant rien d'un écrin. Mais Les Violons du Roy, dirigés par leur chef en résidence Éric Petkau, y ont accompli un véritable miracle: transformer l'acoustique habituellement ordinaire de ce vaisseau en un vecteur sonore absolument parfait. Concentré, passionné, attentif, chacun de ces 17 instrumentistes a fait merveille, de sorte que l'ensemble sonnait de façon sublime: avec cette sonorité ronde et pure qui caractérise les Violons depuis longtemps, ces nuances subtiles, cette audible clarté de la moindre note. En fermant les yeux (ce que je pouvais faire d'ailleurs puisque, placée à l'arrière, je voyais à peine les musiciens), je me serais crue au Palais Montcalm, la belle résidence des Violons à Québec.

Je crois que tout part d'un tempo impeccable, longtemps travaillé afin qu'il soit respecté dans les moindres entrées, sorties, tenues de note. C'est un aspect auquel bien des ensembles et orchestres sont moins attentifs. Ça c'est la base. Ensuite, il y a le soin apporté à chaque détail, et à l'ensemble, pour un résultat admirable.

De sa voix riche et profonde*, Marie-Nicole Lemieux a chanté Bach: des extraits de cantates et d'oratorios de la période de Noël. Le plus extraordinaire: Schlafe, mein Liebster, genieße der Ruh' (Dors, mon bien-aimé, jouis de ton repos), qu'elle maîtrise et illumine avec son talent, son expérience, sa ferveur, sa joie manifeste de chanter.

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À la maison, chaque année depuis des lustres pendant la période des Fêtes, nous écoutons un disque qui regroupe des concerti grossi de Corelli, Torelli, Locatelli, et celui de Manfredini, Pastorale per il Santissimo Natale, qui était au programme hier. Sur disque, c'est déjà très beau, mais en direct, par les Violons du Roy, c'était vraiment extraordinaire, je le redécouvrais en quelque sorte. (Cliquez l'image ci-dessus pour l'entendre par un autre ensemble).

Il y a eu aussi des oeuvres de Haendel et de Molter. Et le merveilleux "À la Pastorelle" de Telemann, qui a ouvert la deuxième partie, fut un des meilleurs parmi les excellents moments de ce concert.

Marie-Nicole Lemieux a aussi chanté Sainte nuit et Ah! quel grand mystère, offrant en rappel Le Sommeil de l'enfant Jésus, qu'elle a dédié aux gens de l'UQAC qui lui ont remis en avril dernier un doctorat honoris causa (plusieurs étaient présents dans la salle). Il fallait bien chanter Noël, elle l'a fort bien fait, mais le meilleur du concert était déjà passé.

Notes:

- Ce concert affiche complet pour ce soir (mardi) à Dolbeau-Mistassini.
- Il a été donné au Palais Montcalm le vendredi 17 décembre.
- À la radio, il sera diffusé sur Espace musique, le mercredi 21 décembre à 20 h.

Dans les médias:

- Le Quotidien: critique par Anne-Marie Gravel
- Le Soleil: entrevue préalable (pour Québec) avec Richard Boisvert
- Complément à l'interview

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* Mais que sa voix s'apaise ou gronde,/ Elle est toujours riche et profonde./ C'est là son charme et son secret.  (Charles Baudelaire, Le Chat, dans Les Fleurs du mal).

13/01/2011

Le pays retrouvé

J'ai écrit sur mon profil Facebook que j'avais pleuré en écoutant Marie-Nicole Lemieux chanter Connais-tu le pays, sur son plus récent disque, intitulé Ne me refuse pas.

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J'ai pleuré parce que c'est beau, bien sûr. Mais cette beauté que je lui entends, outre celle de la voix, de l'interprétation, de l'accompagnement, elle vient de très loin dans mon histoire personnelle.
C'est un des premiers airs d'opéra que j'ai écoutés, à huit-dix ans, sur les 78-tours que possédait mon père. C'était difficile de comprendre les paroles, car la diva (je ne sais plus laquelle) était italienne, ou peut-être américaine. Non francophone donc.
Comment comprendre "le pays des fruits d'or" (j'ai longtemps cru que c'était "le pays du velours") et "la salle aux lambris d'or", qui débutent le deuxième vers de chacun des deux couplets (répétition, allitération, rime intérieure pour les amateurs d'analyse littéraire!),  termes déjà un peu rares pour une enfant, et en outre prononcés avec un fort accent étranger.  Je demandais à mon père: il connaissait presque tout le texte, mais ces quelques passages lui échappaient à lui aussi.
(Je vous parle d'un temps -très ancien- où Internet n'existait pas)
Plus tard, j'ai éventuellement retrouvé toutes ces paroles (elles sont ici, citées par Jack sur son blogue), parce que je les ai vues écrites notamment. Mais je n'ai jamais entendu d'interprétation vraiment satisfaisante de cet air, tiré de l'opéra Mignon, de Jules Massenet.
Peut-être celle de Célestine Galli-Marié, la mezzo-soprano française qui a créé le rôle en 1866, était-elle excellente...
Jusqu'à ce jour récent où j'ai écouté, directement dans mes oreilles via mon iPod, cet air qui figure sur le disque de la contralto jeannoise. Les mots enfin sont là, dans toute leur splendeur et leur poésie (celle de Goethe, fort bien traduite en français par les librettistes). C'est le phrasé de quelqu'un qui comprend intimement ce que dit le texte, et qui sait insuffler vie et beauté à ces vers autant qu'à cette musique.

Joie, nostalgie, souvenirs, musique, beauté: il n'en faut pas plus pour verser quelques larmes.

Vous pouvez l'entendre sur cette vidéo, avec une photo fixe de Marie-Nicole Lemieux:

 

Et c'est d'autant plus extraordinaire et émouvant que cette grande artiste est une femme de ma région, que j'ai rencontrée à quelques reprises, que j'ai entendue en concert plusieurs fois, au Saguenay, à Québec, à Montréal.

C'est cette pièce qui m'a d'abord attirée vers le disque, de même que cette merveille qu'est Mon coeur s'ouvre à ta voix, de Camille Saint-Saëns (tiré de Samson et Dalila, ici sur Youtube), que j'ai beaucoup écouté dans une période troublée de ma vie adulte.
Je connaissais assez peu ou pas du tout les autres arias (sauf bien entendu L'amour est un oiseau rebelle), qui figurent sur le disque: je les ai découverts, ils sont tous magnifiques, et tous en français!!!