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25/09/2013

Fusion musicale

Stéphane Tétreault, Zhengyu Chen, Jeunesses musicales, violoncelle, piano, Brahms, Schubert, Bach, Jonquière, Salle Pierrette-Gaudreault

Une sonate de Brahms merveilleusement jouée par le jeune violoncelliste Stéphane Tétreault et le pianiste Chen Zhengyu. Au deuxième mouvement (qu'on entend sur la vidéo, par Stéphane Tétreault et un autre pianiste), je remarque que le thème, joué d'abord de façon sautillante avec des notes détachées et attaquées (spiccato peut-être), est repris ensuite legato, sur des notes égales et liées entre elles. Sans doute que bien d'autres compositeurs ont utilisé ce genre de variation mais là, il m'éblouit soudain, et à chaque reprise, j'admire le contraste saisissant entre ces deux styles, qui donnent une ambiance totalement différente à la même ligne mélodique: d'abord joyeux, alerte et dansant, et ensuite langoureux et romantique.

Ce concert tout entier, présenté dimanche dernier par les Jeunesses musicales à la salle Pierrette-Gaudreault de Jonquière, était d'ailleurs un pur joyau. J'avais vu le violoncelliste jouer à Laterrière l'an passé (voir mon billet ici). Il était déjà excellent mais depuis, il a progressé de façon remarquable, me semble-t-il. Beaucoup plus à l'aise, il fusionne davantage avec son instrument (un Stradivarius de 1707, prêté par Jacqueline Desmarais). Il joue avec tout son corps, comme dans un pas de deux, son visage est expressif, parfois extatique, comme s'il était  submergé par la beauté de ce qu'il joue.

Mais il n'oublie rien: ni les notes de ses partitions dont certaines sont d'une difficulté extrême (il joue tout de mémoire), ni le rythme (infernal à certains moments), ni la technique. Il possède tout ça à merveille. Bach, Haydn, Schubert, Saint-Saëns et Tchaïkovski sont au programme, et en rappel, la très belle Méditation de Thaïs, de Massenet.

Le pianiste est tout aussi expérimenté et talentueux. La connivence entre les deux musiciens est parfaite, c'est merveilleux de les voir et de les entendre, totalement concentrés et engagés dans leur jeu, un plaisir partagé par l'auditoire qui remplit presque tous les sièges.

06/03/2012

Plaisirs de proximité

lauraAndriani.jpgÀ deux reprises récemment, je me suis assise très près des musiciens pour des concerts, une chose que j'évite en général, du moins que j'évitais jusqu'ici.

Quand j'ai acheté des billets à l'entrée de la salle Pierrette-Gaudreault pour le concert intitulé Trio Baroque, je n'ai pas trop vu où étaient les sièges jusqu'à ce que j'y sois assise: première rangée, au bord de la section centrale. À deux ou trois mètres des musiciens, et à la même hauteur qu'eux. Cela ne me plaisait pas trop au départ, mais dès qu'ils ont commencé à jouer, j'ai changé d'idée et finalement j'ai beaucoup apprécié cette proximité.

Le violon, le hautbois, le petit orgue mobile et surtout le clavecin sonnaient extrêmement clair. C'était comme si les musiciens, Laura Andriani (photo ci-dessus) au violon, Philippe Magnan au hautbois et Régis Rousseau au clavecin (et à l'orgue), jouaient dans mon salon. Grâce à cette proximité, et bien entendu au talent de ces interprètes aguerris, j'ai eu l'impression de pénétrer dans l'intimité de Bach, Pachelbel, Haendel, Leclair, Couperin, Vivaldi: c'était vraiment formidable. À la sortie, j'ai entendu d'autres spectateurs, placés plus loin de la scène, déplorer que "le clavecin, ça joue assez pas fort". Or moi je l'avais parfaitement entendu.

justine Pelletier, Laura Andriani, Régis Rousseau, Philippe Magnan, jeunesses musicalesEncouragée par cette expérience, j'ai pris place dans la quatrième rangée pour écouter la pianiste Justine Pelletier, dont le concert était présenté dimanche dans la même salle par les Jeunesses musicales. Là encore j'étais à peu près à la hauteur de la musicienne, que je voyais de dos, et je voyais très bien ses mains danser sur le clavier. Magnifique, elle a proposé un programme romantique, Schumann, Schubert, Albéniz, Chopin, joués avec compétence, concentration, passion.

S'exprimant dans un français impeccable, Justine Pelletier a présenté brièvement chacune des pièces: l'histoire de leur composition et sa perception de l'oeuvre. Aussi agréable à entendre parler que jouer. Un visage qui rappelle étrangement celui de Julia Roberts.

Tout cela était fort beau, fort agréable. Mais c'est la dernière pièce, la rhapsodie hongroise no 12 de Liszt, qui m'a fait la plus forte impression. Une oeuvre impétueuse, variée, heurtée, puissante, exécutée avec toute l'ardeur et toute la virtuosité requises, par une artiste totalement engagée dans chaque instant: toute la salle fut transportée par ce jeu, par ce maelström de fougue, de force, d'énergie: c'est ce qui s'appelle finir en beauté.

Cette fin a peut-être projeté un peu d'ombre sur l'excellence de ce qui avait précédé... Reste que c'était formidable. De ces moments qui emportent, qui arrachent tout.

 

04/10/2011

Jelena Milojevic: une musicienne en or

Oui, "en or" parce qu'elle portait avec une suprême élégance un pantalon doré et scintillant, coupé dans une sorte de lamé.

Belle grande jeune femme au port altier, l'accordéoniste Jelena Milojevic a conquis le public fort nombreux qui est allé l'entendre dimanche au premier concert de la saison offert par la section régionale des Jeunesses Musicales, à la salle Pierrette-Gaudreault de Jonquière. (Sur la vidéo, elle présente son instrument (en anglais) et joue quelques pièces).

Jelena Milojevic, Jeunesses Musicales, accordéon, JonquièreElle a séduit son auditoire par son allure, par les propos toujours pertinents qu'elle a tenus, dans un français impeccable teinté d'un charmant accent, et par les histoires qu'elle a racontées, certaines très sombres étant donné qu'elle est née en Croatie.

La guerre était présente dans son programme, notament par une composition de son mari Aleksandar Milojevic, d'origine serbe, en hommage à une petite fille de trois ans tuée dans un bombardement, et par une pièce de Victor Vlasov inspirée par le Goulag.

jelena milojevic,jeunesses musicales,accordéon,jonquière

Un volet sombre cependant tempéré par l'atmosphère joyeuse et vivante de l'ensemble, le sens du rythme et la joie de vivre de cette lumineuse artiste.

Elle pimente ses présentations de notes humoristiques, et accompagne ses exécutions de mimiques, de sourires, de gestes qui appuient les rythmes parfois endiablés des pièces, faisant preuve d'une aisance sur scène peu commune.

Mais surtout quelle musicienne! Elle fait corps avec son accordéon, un instrument difficile, qu'elle maîtrise, qu'elle aime manifestement et dont elle tire des sonorités et des rytmes éblouissants, étonnants, séduisants.

 

Très peu de pièces connues dans ce programme qui faisait la part belle aux compositeurs russes et slaves du 20e siècle, inspirés par les thèmes folkloriques des pays de l'Est, où l'instrument est aussi très connu et utilisé. Ce que l'on en connaît ici est plutôt associé au style musette français et au tango argentin (elle a joué tout de même quelques pièces d'Astor Piazzola).

Jelena Milojevic, Jeunesses Musicales, accordéon, Jonquière

Jelena Milojevic vit aujourd'hui à Vancouver où elle enseigne la musique. Gagnante de plusieurs concours internationaux, elle s'est donné pour mission de faire connaître l'accordéon, pour aider à consolider la place qu'il a conquise au sein des instruments classiques. Avec ses qualités exceptionnelles de musicienne et de performeure, elle est une ambassadrice tout indiquée pour son instrument.

Après l'entracte, elle a souligné que ce jour (2 octobre) était très spécial pour elle, car "c'est la fête de mon ami Luc". Elle parlait de Luc Bouchard, responsable dévoué des Jeunesses musicales depuis nombre d'années, qui agissait comme animateur et présentateur du concert. Elle a joué les premières mesures de "Bonne fête", le public a continué pour lejubilaire tout ému qui indiquait son âge avec ses doigts: 70 ans!

Bref, une surprise, une découverte, une rencontre, comme savent en procurer les concerts des JMC. Nous sommes tous  tombés sous le charme de Jelena Milojevic et son accordéon.

12/04/2011

Les Jeunesses musicales: un phénomène

Jessy Dubé, Jeunesses Musicales, Jonquière, Céline BoisvertDifficile d'expliquer le succès des concerts des Jeunesses musicales présentés à Jonquière: chaque fois, une salle comble ou presque (plus de 350 personnes, salle Pierrette-Gaudreault non réduite), et même des spectateurs repoussés à l'entrée pour certaines prestations. Il y a l'heure et le jour (le dimanche à 16 heures), le coût modeste du billet, la possibilité de prendre un repas ensuite, le dévouement des bénévoles, mais beaucoup d'autres organisations offrent de semblables atouts sans obtenir le même succès.

Autre élément, et non le moindre, pour les abonnés: la certitude d'entendre de la bonne musique jouée par des artistes de talent. Pas des vedettes, rarement des noms connus, mais de bons interprètes. Musiciens accomplis ou en formation, ils sont soigneusement sélectionnés, et toujours de bon calibre.

Pour une jeune interprète comme la violoniste Jessy Dubé (article ici dans Le Quotidien, la photo [ci-haut] est de Sylvain Dufour), qui se produisait dimanche dernier lors du concert dit de la relève, c'est une occasion exceptionnelle, rarement offerte même à des solistes réputés: pouvoir jouer pendant deux heures, devant un public averti et nombreux, c'est une expérience unique, qui représente sûrement uen étape importante dans leur formation. La violoniste, qui jouait sur un instrument moderne créé par Élisabeth Wybou, a en outre reçu une bourse de 1000$, pour l'aider à poursuivre ses études. En Suisse, espère-t-elle, où elle venait de passer des auditions dans quelques écoles réputées.

Ce concert annuel de la relève est donné par un musicien ou un ensemble du Saguenay-Lac-Saint-Jean, choisi par l'organisation régionale des JMC: on y a vu passer au cours des années, des interprètes qui font aujourd'hui une belle carrière: Amélie Fradette, Julie Boulianne, Jean-Philipe Tremblay, le violoncelliste Sébastien Gingras...

Ce dernier est le fils de Céline Boisvert, la pianiste qui accompagnait Jessy Dubé: accompagner n'est pas un mot assez fort, car sa partie était aussi imposante que celle de la soliste, ce que cette dernière n'a pas manqué de souligner. Entre autres pour la sonate pour piano et violon de Beethoven (op.30, no 2) et le premier mouvement du concerto de Tchaïkovsky, dont la réduction pour piano a été écrite par le compositeur lui-même. (Sur la vidéo ci-dessus, l'oeuvre est jouée par Sarah Chang et l'Orchestre symphonique de Montréal dirigé par Charles Dutoit).

À ces oeuvres il faut ajouter la Suite italienne pour violon et piano de Stravinsky, Zigeunerweisen de Sarasate, et un caprice de Paganini. Programme riche et chargé, présentation éclairante des oeuvres, interprète(s) solide(s): musique et plaisir.

23/03/2010

Une gueule d'atmosphère

Merveilleux concert donné dimanche après-midi par l'extraordinaire pianiste Sergei Saratovsky pour les Jeunesses musicales. Salle Pierrette-Gaudreault comble à quelques sièges près. Le musicien d'origine russe fait l'effort de nous parler en français, réussissant à livrer un message très clair dans une langue avec laquelle il n'est pas très à l'aise.


Sergei Saratovsky ressemble davantage à ce que l'on voit sur la vidéo, où il interprète le nocturne op.9 no 3 de Chopin, qu'à la photo promotionnelle (ci-contre):  on dirait que ce n'est pas le même garçon.saratovskyJeune.jpg

Son programme (et sa force):  une musique descriptive, grave ou ludique. Même dans les nocturnes de Chopin, il se tient loin des grands élans du romantisme.

Virtuose accompli, il privilégie le travail sur les couleurs, sur l'éclairage, sur la création d'atmosphères (d'où mon titre). Il a d'ailleurs dit d'entrée de jeu qu'il pensait à des couleurs pour interpréter certains passages. Une musicalité remarquable se dégage de son jeu à la fois précis et fluide.
Après la très belle sonate de Mozart (K. 133, la seule pièce qui ne soit pas descriptive à proprement parler) se succèdent les 22 brèves pièces du Carnaval de Schumann, et deux nocturnes de Chopin, fabuleux. De fluide, son jeu devient pour ainsi dire liquide dans les trois Estampes de Debussy, aux couleurs de l'Asie, de l'Espagne... et des Jardins sous la pluie.
Il nous fait découvrir le compositeur russe  Sergeï Liapounov, dont il joue quatre études, extrêmement difficiles, ses mains volent sur le clavier, tellement vite qu'on en voit quatre: c'est fascinant, grisant.
Pour terminer dans le même esprit, il propose en rappel une pièce de Rachmaninov (je n'ai pas compris le titre, ça sonnait comme "Le Lac"...), un peu moins longue que les autres, peut-être, mais tout aussi ornée et exigeante.
Donné par un artiste accompli et totalement engagé dans son art, un magnifique concert dont j'ai apprécié chaque instant.