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29/09/2008

Annie Ernaux: roman troublant

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Une autre nuit -presque- blanche en compagnie d’un livre. Cette fois c’était Les années, d’Annie Ernaux. Le chroniqueur de La Presse Pierre Foglia aime beaucoup cette auteure française (photo de droite) totalement atypique, et il a en particulier dit beaucoup de bien de ce livre, son plus récent. Pour ma part, c’était le premier de ses nombreux romans que je lisais.
Je l’ai donc terminé au petit matin. Et ensuite, j’ai eu du mal à m’endormir, parce qu’il m’avait troublée. Annie Ernaux, née en 1940, elle raconte sa vie, mais d’une manière très originale: comme si elle se fondait avec la marche de l’histoire, emportée par les courants politiques et sociaux, tout en conservant la distance nécessaire pour les observer et pour y inscrire son destin individuel.
Même si cela se passe en France, il y a beaucoup de similitude avec le Québec, notamment en ce qui concerne l’évolution de la famille, du mariage, de la lutte des femmes, les habitudes de consommation, les idées. Seuls les noms de lieux et les marques de commerce sont différents, mais pour moi, qui ai vécu en France au début des années 70,  tout ce dont elle parle est plutôt familier.
annees1.jpgDu fonds commun de cet univers et de cette histoire, elle se détache par le livre qu’elle écrit, et par son style particulier: l’imparfait de l’indicatif et la troisième personne du singulier évoquent le rythme et le souffle d’un train qui fonce vers on ne sait où sans pouvoir s’arrêter. Passagère à bord du train, la narratrice  entre en gare à quelques occasions, par le biais d’une photo décrite en détail, et qui marque une étape de sa vie.
Comme toute création et plus généralement toute action humaine, le livre tente de  “sauver quelque chose du temps où  l’on ne sera plus jamais” (dernière phrase du roman), autrement dit de conjurer l’échéance de la mort. C'est donc un livre bouleversant, original, une vraie oeuvre romanesque.
Après l’avoir terminé, j’écrivais dans ma tête, comme elle, mais avec mes mots, mes images, mes idées, bref, tout ça tourbillonnait, agité par cette conclusion à la fois noire et lumineuse.
J’ai dû penser à mes leçons d’espagnol pour réussir à m’endormir.