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04/12/2012

Entre vengance et clémence, le choix de Titus

La clemenza di tito, Titus, Bérénice, metropolitan opera, Bicket, Jean-Pierre Ponnelle, Elina Garança, Giuseppe Filianoti, Barbara Frittoli

Le titre de l'opéra, La Clemenza di Tito, résout l'équation de mon propre titre. L'empereur romain Titus choisit d'être clément, de pardonner à ceux qui l'ont trahi et voulu le faire mourir. Même si les lois et coutumes voudraient qu'il les fasse exécuter.

J'ai bien aimé ce personnage, tout en douceur et en compassion.

De graves problèmes techniques ont cependant affecté la présentation de cet opéra de Mozart.  Il y a eu en réalité dix minutes de bon son, les dix dernières. Nous venions d'endurer trois heures d'une transmission sonore déficiente: son étouffé, grésillements, grondements, silences etc...  C'est un changement de logiciel survenu au Metropolitan Opera qui aurait causé tous ces problèmes, nous expliquait le jeune employé du cinéma Jonquière, fort désolé de cette situation à laquelle il ne pouvait rien.

En général, le premier acte m'a semblé un peu ennuyeux, et le second, absolument merveilleux.

Entre les deux actes, les interviews menées par Susan Graham avec les artistes m'ont permis de mieux apprécier la suite. Le chef Harry Bicket a notamment expliqué pourquoi il aimait la musique de ce dernier opéra composé par un Mozart malade et en grande difficulté financière: pour remplir une commande qui tombait à point, il revint à l'opera seria qu'il avait pratiqué à ses débuts, mais en y mettant toute son expérience, tout le savoir-faire acquis entre-temps, créant ainsi une partition tout à fait exceptionnelle, à la fois dans son oeuvre et dans l'opéra en général.

Je n'avais pas vraiment besoin de ça pour aimer le divin Mozart, remarquez, car sa musique est toujours aussi sublime.

Ne pouvant pas apprécier les performances vocales à leur juste valeur, à cause de ces problèmes de son, je me suis intéressée à autre chose. À leur jeu par exemple. Le personnage central est Sesto, ami de Titus. La perverse Vitallia, dont il est épris, lui ordonne de tuer l'empereur car elle croit que ce dernier lui préfère Bérénice. (Elle se trompe: malgré une grande passion réciproque, Titus vient de renvoyer Bérénice, que nous voyons, dans une scène muette, embarquer sur un navire qui la conduira vers sa Palestine natale).

Je ne sais pas si c'est parce que Sesto est un rôle travesti, joué par la merveilleuse Elina Garanča, mais il ne passe guère de sensualité entre elle et Barbara Frittoli, qui incarne Vitallia.

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J'ai remarqué en revanche le visage très expressif de cette dernière: oeillades, sourires en coin, comme un livre ouvert, ses traits mobiles expriment sa malice, sa perfidie, sa ruse, et plus tard, son repentir. Vêtue d'une époustouflante robe noire (photo ci-dessus), Frittoli assume aussi avec élégance la progression de Vitallia de la perversité vers la douceur, ce qui donne ce très beau Non piu di fiori, chanté avec accompagnement de cor de basset.

Titus est joué par Giuseppe Filianoti, et il y a un autre rôle travesti, celui d'Annio, joué par Kate Lindsay.

Malgré donc une transmission imparfaite, je n'ai pas regretté d'avoir été voir La clémence de Titus. Surtout que l'opéra (livret de  Caterino Mazzolà d'après Metastase et Corneille) commence là où se termine Bérénice, le chef-d'oeuvre de Racine, c'est-à-dire avec le départ de Bérénice. Titus et elle se séparent par devoir, invitus invitam, malgré lui malgré elle:

Dans un mois, dans un an, comment souffrirons-nous,
Seigneur, que tant de mers me séparent de vous ?
Que le jour recommence et que le jour finisse,
Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice,
Sans que de tout le jour je puisse voir Titus ?