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09/07/2010

Régis Rousseau: un programme en or

regisRousso.jpgCe n'est certes pas le nom de Régis Rousseau qui avait attiré tant de monde à la cathédrale mardi alors qu'il avait convaincu le ténor Marc Hervieux, qui est aussi un ami à lui, de  s'y produire en concert.

Et pourtant la prestation de l'organiste, qui est également directeur du Conservatoire de musique de Saguenay, fut excellente. En accompagnement du ténor, dans les airs sacrés mais aussi dans les pièces profanes, notamment les deux arias de Puccini, E lucevan le stelle et Nessun dorma, que l'on entend certes rarement accompagnés à l'orgue (je ne sais pas s'il a fait lui-même les transcriptions): il a su souligner de couleurs inouïes (au sens de jamais entendues), le tempo et la mélodie.

Mais c'est dans les pièces pour orgue seul que j'ai surtout apprécié son jeu solide et sensible.

De plus, il a eu la brillante idée de mettre au programme une pièce du compositeur saguenéen François Brassard (1908-1976), qui a donné son nom à la salle du Cégep de Jonquière. En mars dernier, le  journaliste Daniel Côté a publié dans Progrès-Dimanche une série de textes très pertinents sur ce compositeur, ethnologue et organiste, mentionnant que ses oeuvres sont totalement inconnues du public, car elles sont très rarement jouées par les interprètes.
Dont acte. Régis Rousseau a répondu présent par la bouche... de ses tuyaux! Avec la Sonatine en si bémol, une oeuvre dynamique, colorée, vraiment agréable à entendre. L'occasion ne pouvait être mieux choisie pour faire découvrir François Brassard, leur compatriote, à plus de 2000 Saguenéens!

Un autre choix judicieux: pour faire sonner le Casavant, au lieu de la sempiternelle Toccata et fugue de Bach (fort belle par ailleurs), il a opté pour le Prélude et fugue sur le nom de BACH (ce lien conduit à un texte en anglais qui décrit l'oeuvre et explique que les lettres BACH correspondent aux notes si bémol, la, do, si (bécarre) dans le système allemand de notation musicale) de Franz Liszt: une oeuvre puissante et complexe, déployée avec force et précision par un interprète de haut niveau.

Double coup de chapeau donc à Régis Rousseau: l'un pour avoir convaincu Marc Hervieux de venir chanter à Chicoutimi, l'autre pour avoir mis à son programme une oeuvre de François Brassard!

08/07/2010

Star lyrique

MarcHervieux.jpgLa cathédrale de Chicoutimi était bondée mardi pour le concert gratuit donné par le ténor Marc Hervieux (photo) et l'organiste Régis Rousseau. 2000 personnes, peut-être 2500.

Impossible de stationner aux abords du temple. J'ai dû aller sur la rue Jacques-Cartier. Une dame assise sur son balcon m'a demandé ce qui se passait en voyant tous ces gens converger vers la cathédrale. Quand je lui ai dit que c'était un concert de Marc Hervieux, elle a vivement réagi et a dit regretter de ne pouvoir s'y rendre... parce qu'elle venait de se laver la tête!
Ravi d'accueillir tous ces paroissiens d'un soir, le curé Gaétan Thibeault a voulu leur faire plaisir en citant quelques vers de Musset et de Lamartine, notamment ceux-ci:

Lorsque le pélican, lassé d'un long voyage,
Dans les brouillards du soir retourne à ses roseaux,
Ses petits affamés courent sur le rivage
En le voyant au loin s'abattre sur les eaux.



Il a comparé Marc Hervieux au pélican qui va nourrir ses enfants affamés! Il savait sans doute, Monsieur le curé, que plus loin dans le poème, le grand oiseau, après avoir chassé en vain, s'arrache le coeur et l'offre en pâture à ses fils. C'est la métaphore de Musset, qui compare l'oiseau au poète (ou à tout créateur),  celui-ci devant puiser en lui-même ce qu'il donne au public affamé et sacrifier finalement sa vie à son art. N'a-t-il pas écrit aussi:

Ah ! frappe-toi le coeur, c'est là qu'est le génie

(Dans la bibliothèque de mes parents, il y avait entre autres les poésies complètes d'Alfred de Musset, collection la Pléiade. À la suggestion de mon père, j'ai appris par coeur Le Pélican,  de même que Pâle étoile du soir: nous nous amusons encore parfois à les réciter...)

(Si cela vous intéresse, vous trouverez au bout de ce lien le texte complet du poème, incluant les vers qui précèdent et suivent l'épisode du pélican (et qui l'explicitent), plus une analyse du texte conçue pour les candidats au bac français).

Je ne sais pas si Marc Hervieux voit les choses comme ça, mais il puise lui-même dans sa vaste poitrine (et bien sûr dans sa tête, son coeur et son expérience) ce qu'il faut pour remplir tout l'espace sonore de la cathédrale.
J'aime bien pour ma part les exploits de volume chez les chanteurs lyriques, à condition qu'ils n'effacent pas tout le reste (justesse, émotion, diction) et c'est un peu le problème de Marc Hervieux  dans les fortissimi pucciniens: préoccupé de l'exploit, qui j'en conviens est très difficile à réaliser, il néglige parfois les autres aspects du chant. Et le bon peuple applaudit et le traite en rock star...

Je suis ambivalente à l'égard de Marc Hervieux: il a beaucoup de qualités, vocales et dramatiques, mais je trouve qu'il en fait trop et qu'il ne réussit pas tout. En général, il m'énerve...

Son Ave Maria (celui de Schubert), plus retenu, était impeccable. Et il avait un beau programme: surtout des airs sacrés, un peu d'opéra, Maria (du West Side Story de Leonard Bernstein, complètement raté à mon avis).
Excellent choix pour le dernier air: Le Vaisseau d'or, ce merveilleux poème d'Émile Nelligan mis en musique par André Gagnon (pour le drame musical Nelligan).

J'étais assise au premier jubé (où il ne faisait pas trop chaud), donc sous les pieds des artistes (que l'on voyait sur écran pendant la première partie, la plus consistante, qui se passait au deuxième jubé). D'où une certaine distorsion du son qui m'empêche d'évaluer avec justesse certains aspects de la prestation.
Les deux musiciens sont descendus dans le choeur pour la deuxième partie, après un entracte écourté à cause de la chaleur.

Bref, un succès monstre, certes la plus grande foule jamais réunie pour un concert à la cathédrale...

(Dans la prochaine note, je vous parle de la belle prestation de l'organiste Régis Rousseau).

24/05/2010

À l'ombre d'un piano

MatthieuRed.jpg

crédit photo: Melissa Dinel  

Amis, parents et mélomanes ont quitté dimanche (23 mai)  l'air chaud et humide du printemps saguenéen pour la relative fraîcheur de la salle Orphée (Atelier de musique de Jonquière), dans le secteur Arvida, afin d'y entendre le pianiste Matthieu Fortin, natif de Chicoutimi, qui proposait un concert intime et fort intéressant.

J'entends depuis nombre d'années mentionner le nom de Matthieu Fortin, qui, après avoir remporté tout ce qu'il y avait de concours de musique dans la région, a poursuivi sa formation et continué de remporter des concours à l'extérieur. Aujourd'hui âgé de 27 ans, il jouit d'une solide expérience comme soliste, il a également travaillé avec des ensembles et  des compagnies de danse, notamment Cas public, fondé et dirigé par la Chicoutimienne Hélène Blackburn. De retour de Berlin où il a travaillé avec Jacques Rouvier, il a un solide bagage et sans doute, beaucoup d'avenir. Dans la salle, il y avait notamment la pianiste Jacinthe Couture, avec qui il a étudié pendant plusieurs années au Conservatoire de musique de Saguenay, où elle enseigne toujours d'ailleurs.

Tout cet acquis ne l'empêche pas d'avoir l'air plutôt timide.

pianomatt.jpg

crédit photo: Melissa Dinel  

Néanmoins il donne, avant de commencer à jouer, quelques explications, brèves mais précises et éclairantes sur les pièces qu'il a choisies.
Son court programme comprend trois noms: Beethoven, Chopin et Ravel. Rien de léger dans tout cela: de la substance, du paroxysme, du fortissimo presque tout le temps.

Nulle timidité ensuite devant son clavier: il déploie force, maîtrise, virtuosité, et propose une lecture assez personnelle des oeuvres choisies, axée sur l'intensité, la montée dramatique, le lyrisme. Quelques erreurs de doigté ne l'empêchent pas de mettre en valeur la beauté de ces pages d'une difficulté extrême.

Après la gravité et la complexité de la sonate opus 109,  la trentième des 32 qu'a écrites Beethoven,  et les étourdissantes variation de la Berceuse op. 57 de Chopin, le pianiste a offert les meilleurs moments de son concert en jouant le grand scherzo (no 2 op 31) de Chopin,   que l'on peut entendre ici interprété par Krystian Zimerman.

Le jeune musicien a su mettre en valeur le rythme, la mélodie, et la puissance de cette oeuvre très connue.
Il a joué enfin Gaspard de la nuit, de Ravel, plongeant le public dans une succession d'atmosphères: fluide pour Ondine, très sombre pour Le Gibet, frénétique et agitée pour Scarbo. Ces pièces sont associées à des extraits d'une suite de poèmes en prose  d'Aloysius Bertrand, intitulée Gaspard de la nuit, j'ajoute donc en fin de note une partie du poème intitulé Ondine.

Il y avait environ 75 personnes dans la petite salle, ce qui est somme toute assez bon et lui permettra de recueillir quelques sous pour poursuivre sa carrière et sa formation, et pour avancer dans ce métier très exigeant.
Matthieu Fortin sera candidat au prochain Prix d'Europe, dont les épreuves se dérouleront à Montréal du 8 au 11 juin prochain. Le grand prix est une bourse d'études de 25 000$. La lauréate de ce prix en 1974 était... Jacinthe Couture.

Ondine

(...) Sa chanson murmurée, elle me supplia de recevoir son anneau à mon doigt, pour être l'époux d'une Ondine, et de visiter avec elle son palais, pour être le roi des lacs.

Et comme je lui répondais que j'aimais une mortelle, boudeuse et dépitée, elle pleura quelques larmes, poussa un éclat de rire, et s'évanouit en giboulées qui ruisselèrent blanches le long de mes vitraux bleus.

 

 

 

C'est l'époque où fleurissent en abondance les pommetiers décoratifs. Par exemple  celui-ci, devant l'édifice de la Sécurité publique, que j'ai croqué en sortant du concert.

 

malus4.jpg

13/05/2010

André Mathieu, Alain Lefèvre et le Saguenay-Lac-Saint-Jean

C'est le printemps André Mathieu,  on dirait. Compositeur génial et précoce (décédé le 2 juin 1968, à l’âge de 39 ans), pianiste virtuoseandreMathieu.jpg hors pair, il a connu un destin tragique qui a fait de lui un de ces génies méconnus comme il en existe tant au Québec. Nous avons tendance à enterrer vivants ceux qui ont des problèmes, alcool,  drogue, maladie mentale, parce que leur entourage lui-même les rejette et les oublie, ou que l'Église et l'État, complices, veillent à les effacer de la scène publique où ils risqueraient de déranger l'ordre établi.

On voyait lundi soir à la télé de la SRC le pianiste Alain Lefèvre jouer son extraordinaire concerto no 4 avec l'Orchestre symphonique de Montréal sous la direction de Kent Nagano. Une musique magnifique (pour voir cet enregistrement intégral,  cliquez ici ou sur l'image ci-dessous, et ensuite sur le lien qui apparaît dans la page). Et chapeau à Alain Lefèvre pour avoir tenu à bout de bras ce projet de faire connaître l'homme et revivre sa musique.
mathieuNagano.jpgEn passant, ce concert était donné à salle Wilfrid- Pelletier de la Place des arts. Or le chef Wilfrid Pelletier , alors qu'il était à la tête de l'OSM dans les années cinquante, refusait de jouer les oeuvres de Mathieu (qu'il avait pourtant louangé à ses débuts) au motif qu'il avait des sympathies "séparatistes", ayant notamment composé l'hymne du Bloc populaire. Quelle honte!

Le compositeur n'aura malheureusement pas pu goûter cette douce revanche.

Mathieu et le Saguenay

En fin de semaine dernière, Lefèvre a joué ce même concerto no 4 à Shanghai, lors de l'inauguration du pavilllon du Canada à l'expo universelle.
Le chef invité était le Chicoutimien Jean-Philippe Tremblay, très apprécié déjà sur la scène mondiale. (Une bonne nouvelle à son sujet pourrait être annoncée sous peu...). La semaine dernière, il accordait, de Shanghai, une interview à René Homier-Roy (SRC, Première Chaîne)  après une première répétition avec les musiciens de l'OSS. Voci le lien pour entendre cette interview.

tremblayMathieu.jpg
Jean-Philippe Tremblay et Alain Lefevre à Shanghai.
(La photo n'est pas terrible, mais enfin...)

 

 

Paysages

Après un voyage au Lac-Saint-Jean, impressionné par les paysages qu'il avait pu voir, André Mathieu a composé en 1954  le poème symphonique Mistassini, en hommage au lac et à la rivière du même nom. Bien peu de gens ont entendu cette oeuvre, l'une des dernières qu'il ait écrites, j'ignore même si elle a été déjà jouée en public.
Je ne sais pas si c'est possible, mais ce serait vraiment extraordinaire si l'Orchestre symphonique du Saguenay-Lac-Saint-Jean mettait cette oeuvre au programme d'une prochaine saison, et encore mieux s'il pouvait aller la jouer dans la ville de Dolbeau-Mistassini.

Mélodies

Le baryton saguenéen Jean-François Lapointe est l'un des rares interprètes  à avoir chanté des mélodies d'André Mathieu: il en a albumVerlaine.jpgenregistré quatre sur le très beau disque Poètes maudits dans la mélodie française, qui réunit des poèmes de Verlaine mis en musique par des compositeurs tels que Fauré, Debussy, Reynaldo Hahn et André Mathieu. Afin de ne pas contrevenir aux droits d'auteur  (même si j'ai acheté le disque), je vous donne un lien, si vous voulez les entendre, vers le site Analekta, où on peut les écouter. Descendez au bas de la page, et les numéros 24 à 27 sont des poèmes de Verlaine mis en musique par Mathieu. Le plus beau, à mon avis, c'est Il pleure dans mon coeur.


Jeune pianiste

À titre de curiosité, voici une vidéo bien sympathique: on y voit une jeune pianiste (dont j'ignore le nom) jouer une pièce d'André Mathieu intitulée Les abeilles piquantes (le texte indique "piquants"...) au Festival de Musique du Royaume en 2008. Et si ne je me trompe pas, cette prestation a été filmée à l'auditorium Dufour.


Et encore
Le film consacré à la vie d'André Mathieu, L'enfant prodige, réalisé par Luc Dionne, a été présenté en avant-première à Shanghai.  Il sort au Québec le 28 mai.
Une page Facebook (malheureusement pleine fautes d'orthographe) est consacrée au compositeur et Georges Nicholson vient juste de publier sa biographie aux Éditions Québec-Amérique.

05/05/2010

André Laplante et le quatuor Alcan: l'intensité Brahms

quatuorAlcanImg.jpgSoirée formidable mardi à la salle Pierrette-Gaudreault: le Quatuor Alcan offrait trois oeuvres pour le dernier concert de la saison de l'orchestre symphonique du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Et un invité de marque pour jouer avec lui la dernière oeuvre de ce dernier programme: le pianiste André Laplante (je vous envoie à un site en français, car son "official website" est uniquement en anglais... dommage!).
C'était plein ou presque: environ 230 personnes (les sièges de la partie avant n'étaient pas disponibles). Les mélomanes de la région ont reconnu un grand nom et s'y sont précipités, mais ils devraient courir aussi vite pourr assister aux concerts donnés par le quatuor Alcan seul.
Je me suis surprise à vibrer en écoutant Dmitri Chostakovitch, qui n'est pourtant pas trop dans ma palette de compositeurs. Le quatuor a livré une interprétation remarquable, fougueuse et sensible, de son quatuor no 3, composé en 1946. L'oeuvre évoque la guerre, a pris la peine d'expliquer David Ellis avant de la jouer: cela m'a aidée à comprendre et permis de saisir que les pizzicati marquaient le passage au dernier mouvement même s'il n'y avait pas eu de silence après le quatrième. J'ai adoré ça.AndrePiano.jpg
Il y a eu le Haydn, au début, le no 5 de l'opus 76 qui, dit-on, marque un sommet dans l'art du quatuor. J'ai aimé, mais je trouve cette musique un peu trop claire, trop facile. Je préfère les quatuors de Mozart et surtout de Beethoven. Mais tout de même, c'était très beau, surtout le dernier mouvement.
La pièce de résistance, c'était le quintette pour piano et cordes de Johannes Brahms, qui occupait toute la deuxième partie.

(Sur youtube ici, le troisième mouvement avec Pinchas Zukerman, Ida Kavafian, Gary Hoffman, Paul Neubauer et le pianiste David Golub, décédé en 2000, quelque temps après cette performance)

Grand musicien au sommet de son art, André Laplante se montre totalement habité par la musique tout s'exécutant avec un minimum d'effets visuels et théâtraux. Calme et serein, il regarde ses collègues avec une sorte de tendre complicité pour synchroniser les départs et arrêts, se montre très gentil avec sa tourneuse de pages qui a beaucoup d'ouvrage, car l'oeuvre dense et riche, comporte "beaucoup de notes" mais pas trop... (l’empereur Joseph II aurait dit après avoir entendu L’Enlèvement au sérail : « Trop de notes mon cher Mozart, trop de notes ! »)
johbrahms.jpgTout le monde je crois était conscient d'entendre de la grande musique et de vivre des moments exceptionnels. Des pages et des pages de passages sublimes (une belle description de l'oeuvre ici ), un défi technique pour le pianiste et les musiciens qui l'ont totalement assumé sans oublier l'essentiel: le coeur et l'âme. Bref un chef-d'oeuvre. On ne pouvait qu'écouter et se laisser emporter.
En rappel les musiciens ont rejoué un passage du quintette (3e mouvement je crois) car c'était impensable de proposer une autre oeuvre qui nous aurait sortis de ce que nous venions d'entendre.

Notes:

- Laplante et le quatuor Alcan vont jouer ce même quintette de Brahms demain (jeudi 6 mai) à l'église Unie St-James au concert d'ouverture du Festival de musique de chambre de Montréal.

- Nous sommes donc très chanceux d'avoir pu entendre cette même oeuvre ici à Saguenay, et pour un prix ridicule.

- Je trouve qu'André Laplante ressemble à Richard Desjardins, ou l'inverse. Ce sont deux grands artistes, chacun à sa manière.

- Dans son mot de bienvenue le directeur de l'Orchestre, Jocelyn Robert, a fait référence à l'espoir d'une nouvelle salle à Saguenay, des propos qui ont été chaleureusement applaudis.

- Je regrette toujours de ne trouver, sur le petit programme accompagnant les concerts de l'Orchestre du SLSJ, aucun mot sur les oeuvres jouées. Il suffit de quelques lignes parfois pour rendre une oeuvre plus accessible, pour nous préparer à l'écoute et en améliorer la qualité et l'agrément. Si on veut faire oeuvre utile, former un nouveau public en aidant les néophytes et les jeunes à comprendre ce qu'ils entendent, c'est essentiel, il me semble. Et pour les habitués, c'est une délicate attention qui fait toujours plaisir.

19/04/2010

Un autre orgue déménage

orgueSeul.jpgJ'ai assisté dimanche au concert inaugural de l'orgue de l'église Ste-Famille (que l'on a rebaptisée Saint-Mathieu),  du secteur de Kénogami. Cet orgue Casavant provient de l'église Ste-Cécile, située non loin de là sur la même rue. Cette dernière  a appartenu à l'homme d'affaires André Reid, qui voulait en faire un lieu de diffusion musicale appelé l'Opéra Ste-Cécile. Après avoir résidé dans l'édifice pendant quelques années, André Reid a dû renoncer à ce beau projet, faute de soutien et d'argent, et l'église-opéra est aujourd'hui en vente.

martinReduit.jpg

Le déménagement et l'installation de l'orgue dans son nouveau lieu sont l'oeuvre de Luc Lessard, qui est devenu un spécialiste dans ce genre d'activité, voir sur le site: http://www.musimem.com/lessard.htm
Beaucoup de monde à ce concert, au jugé je dirais environ 500 personnes. Une campagne de financement a été lancée pour défrayer les coûts du déménagement de l'orgue. Objectif: 40 000$. On a annoncé hier avoir déjà recueilli 35 000$ mais je ne sais pas si cela inclut les profits générés par la vente des billets (20$) pour le concert.consolDecoup.jpg
L'organiste Martin Boucher a offert un beau programme, malheureusement beaucoup trop long. Buxtehude, Mozart, Georg Böhm, Théodore Dubois,  et plusieurs oeuvres de Bach. (Il aurait dû jouer la Toccata et fugue à la fin du concert plutôt qu'au début, me semble-t-il, mais enfin...)
Son choix mettait en évidence les qualités de l'instrument, même s'il ne lui a pas fait donner le volume maximum.  Un ou deux tuyaux ne sonnaient pas bien (son grêle ou divisé): quelques petits ajustements à faire sans doute.
La soprano Jacinthe Thibault, que j'avais JacintheThibault.jpgrécemment entendue dans l'opérette Monsieur Choufleuri, a une belle voix puissante. Sa technique n'est pas tout à fait au point, ou en tout cas mal adaptée au répertoire sacré, et elle ne prononce pas bien le latin. Dommage parce qu'elle a chanté uniquement des pièces en latin...
Somme toute, c'était une excellente idée que de marquer la réalisation de ce déménagement de l'orgue par un concert. L'événement a permis au public de voir et d'entendre l'instrument dont le buffet est divisé en deux modules installés de part et d'autre du choeur, visibles de la nef où se tiennent les fidèles. La cérémonie était animée par Louise Malaison, il y avait des notables comme les députés J.P. Blackburn et S.Gaudreault. Nulle trace cependant du maire de Saguenay...

12/04/2010

Monsieur Choufleuri: tellement chou!

nomMEveMunger.jpg

nomEricChal.jpgMonsieur Choufleuri restera chez lui: c'est cette très amusante opérette de Jacques Offenbach que la Société d'art lyrique du Royaume a choisie pour son spectacle annuel. Dimanche après-midi, la dernière des quatre représentations fut donnée devant une salle (Pierrette-Gaudreault) presque pleine.

Encore une fois, une équipe motivée et dyamique s'est concertée pour offrir au public un spectacle amusant et séduisant, impeccable au plan musical.

Des chanteurs-comédiens pleins de talent: outre Marie-Ève Munger, toujours  aussi merveilleuse à tout point de vue, j'ai découvert la superbe voix du baryton Marc-Antoine D'Aragon (photo ci-dessous), et l'excellente soprano Jacinthe Thibault. Le baryton-basse Robert Huard, habitué des productions de la SALR, est un  Choufleuri idéal: petit, gros, colérique, tyrannique...mantDaragon.jpg

Une mise en scène très chalifourienne (signée Éric Chalifour), c'est-à-dire vivante, agrémentée de mouvements saccadés qui produisent des effets comiques, et de quelques clins d'oeil à l'actualité (capitale culturelle) ou à des personnalités connues (Michael Jackson). Il sait mettre en valeur les subtilités du texte français et exploiter le potentiel comique du comédien Martin Giguère (Peterman, le domestique), qui nous déride avec ses folies et ses sparages.

(Je me suis cependant demandé pourquoi le ténor Marc-André Pronovost, qui jouait le prétendant de la fille de Choufleuri, ne portait ni un costume d'époque, ni, comme tous les autres, une coiffure travaillée et remontée. Il vit dans une boîte de carton, dit-on, mais ce n'est pas une raison suffisante).

nomMartinGig.jpgComme l'oeuvre est très courte, on a eu la bonne idée de présenter en deuxième partie un récital d'airs d'opéra, un gala donné dans les décors de Monsieur Choufleuri et parsemé d'interventions loufoques (sans doute du cru Giguère-Chalifour: certaines un peu longues ou sans véritable pertinence). Des airs connus de Mozart, Rossini, Verdi, qui ont permis de mettre en valeur les belles voix dont certaines étaient peu exploitées dans l'opérette, le tout se terminant par un Libiamo... fort enjoué.

Sans oublier les musiciens de l'Orchestre symphonique qui ont fait merveille sous la direction du chef Julien Proulx.

Ces artistes talentueux et allumés s'amusent manifestement sur une scène. Ils ont travaillé fort pour nous offrir cette superbe matinée, toute en rire, en finesse et en musique.

23/03/2010

Une gueule d'atmosphère

Merveilleux concert donné dimanche après-midi par l'extraordinaire pianiste Sergei Saratovsky pour les Jeunesses musicales. Salle Pierrette-Gaudreault comble à quelques sièges près. Le musicien d'origine russe fait l'effort de nous parler en français, réussissant à livrer un message très clair dans une langue avec laquelle il n'est pas très à l'aise.


Sergei Saratovsky ressemble davantage à ce que l'on voit sur la vidéo, où il interprète le nocturne op.9 no 3 de Chopin, qu'à la photo promotionnelle (ci-contre):  on dirait que ce n'est pas le même garçon.saratovskyJeune.jpg

Son programme (et sa force):  une musique descriptive, grave ou ludique. Même dans les nocturnes de Chopin, il se tient loin des grands élans du romantisme.

Virtuose accompli, il privilégie le travail sur les couleurs, sur l'éclairage, sur la création d'atmosphères (d'où mon titre). Il a d'ailleurs dit d'entrée de jeu qu'il pensait à des couleurs pour interpréter certains passages. Une musicalité remarquable se dégage de son jeu à la fois précis et fluide.
Après la très belle sonate de Mozart (K. 133, la seule pièce qui ne soit pas descriptive à proprement parler) se succèdent les 22 brèves pièces du Carnaval de Schumann, et deux nocturnes de Chopin, fabuleux. De fluide, son jeu devient pour ainsi dire liquide dans les trois Estampes de Debussy, aux couleurs de l'Asie, de l'Espagne... et des Jardins sous la pluie.
Il nous fait découvrir le compositeur russe  Sergeï Liapounov, dont il joue quatre études, extrêmement difficiles, ses mains volent sur le clavier, tellement vite qu'on en voit quatre: c'est fascinant, grisant.
Pour terminer dans le même esprit, il propose en rappel une pièce de Rachmaninov (je n'ai pas compris le titre, ça sonnait comme "Le Lac"...), un peu moins longue que les autres, peut-être, mais tout aussi ornée et exigeante.
Donné par un artiste accompli et totalement engagé dans son art, un magnifique concert dont j'ai apprécié chaque instant.

03/03/2010

Saguenay Montréal et vice-versa

La semaine dernière,  j'ai assisté à un concert de l'Orchestre symphonique de Montréal, dirigé par Kent Nagano à la Place des Arts. Le soliste invité, Vadim Repin, violoniste assez réputé natif de Sibérie, jouait le concerto de Beethoven. Une oeuvre que je connais fort bien et que je me réjouissais d'entendre en concert.
J'ai eu un gros doute pendant le premier mouvement: je me suis demandé si le soliste était vraiment, totalement engagé dans ce qu'il faisait, ou s'il jouait sur le pilote automatique. En plus, il s'est vadimRepin.jpg emmêlé les doigts à quelques reprises, ce qui en soi n'est pas trop grave, quand l'âme y est. Les critiques de Montréal ont été très durs, à son endroit, surtout Christophe Huss, du Devoir.
Pour ma part, après la déception causée par le premier mouvement, qui en plus m'a semblé bien trop lent, j'ai fort apprécié  les deuxième et troisième, même si j'ai continué à douter de la sincérité du soliste. Malgré quelques difficultés de kentNagano.jpgcommunication  entre ce dernier et le chef, l'orchestre m'était agréable à entendre et m'a semblé impeccable.
Le vendredi précédent, l'OSM et Nagano avaient joué le même programme, donc ce même concerto de Beethoven,  au Palais Municipal à La Baie, sauf que le soliste était Andrew Wan, le violon solo de l'OSM, qui a peut-être mieux fait que Repin après tout, mais je ne l'ai pas entendu.

En deuxième partie, la symphonie nº 1 de Brahms, que j'ai assez appréciée, même si je ne la connaissais pas et continue à préférer la deuxième.

 

Des Saguenéens

Assise à la corbeille, j'ai pris mes jumelles et me suis amusée à repérer les cinq musiciens de l'OSM qui sont originaires du Saguenay. Celle que je connais le mieux est Marianne Dugal (photo), qui est maintenant deuxième violon solo associé. Je l'avais mariannePhoto.jpginterviewée tout de suite après sa sélection par l'OSM, alors dirigé par Charles Dutoit. Si vous voulez lire les textes que j'ai écrits à cette occasion, suivez ce lien. (Sa situation a changé depuis, je crois qu'elle a au moins un enfant).
Il y a aussi le violoncelliste Sylvain Murray (frère de la pianiste Sandra Murray), qui a commencé très jeune à jouer pour l'orchestre symphonique régional et est passé par les Violons du Roy avant de se retrouver à l'OSM. Je l'ai interviewé et suis allé l'entendre en concert plusieurs fois, dont celle-ci.
J'ai vu aussi le corniste Jean Gaudreault. C'est le fils de Gabrielle et Yvon Gaudreault. Je me souviens vaguement l'avoir interviewé (ça doit faire plus de 30 ans), mais je me rappelle qu'il avait été sélectionné pour l'OSM en même temps qu'un autre musicien du Saguenay, un hautboïste... dont j'ai oublié le nom!
Enfin je connais bien le nom, mais pas la personne du flûtiste Denis Bluteau, qui a quitté la région depuis longtemps, et je ne connais pas du tout le clarinettiste Alain Desgagné, qui a étudié et fait carrière dans l'Ouest avant de se joindre à l'OSM il y a neuf ans.

 

Une centenaire

La présentatrice de la soirée du 24 février a souligné la présence dans la salle d'Aline Séguin, une dame de 105 ans qui avait manifesté le souhait d'entendre Nagano et l'OSM. Cette charmante histoire est racontée ici.

 

09/02/2010

La fête au Quatuor Alcan

andriani.jpg

Le quatuor Alcan a 20 ans. Ce fut célébré au cours de la fin de semaine comme il se doit par une tournée de trois concerts avec l'Orchestre symphonique du Saguenay-Lac-Saint-Jean à Dolbeau, Alma et Jonquière. "C'est rare pour nous de faire une  tournée sans prendre l'avion", constatait avec un certain humour Luc Beauchemin, l'altiste du groupe. Ils ont donc travaillé, même si c'était leur fête, mais ils n'occupaient tout de même pas
beauchemin.jpgleurs premières chaises:  ils étaient plutôt les solistes invités de l'orchestre. J'y étais dimanche après-midi à la salle François Brassard de Jonquière. Au programme entre autres, un concerto pour quatuor à cordes et orchestre de Louis Spohr. Une oeuvre très intéressante, et rarement jouée. Ils ont joué aussi trois mélodies de Robert Schumann, dont c'est aussi la fête cette année (son 200e anniversaire de naissance).
camus.jpgEn deuxième partie, sa symphonie no 4, un extraordinaire chef-d'oeuvre qui fut magnifiquement joué par l'orchestre sous la direction énergique de Jacques Clément. Puis le quatuor Alcan est revenu en rappel avec une belle surprise: les variations sur "Happy Birthday",  de John Williams.  Le violoncelliste David Ellis, dans son style inimitable, a expliqué que, pour célébrer le 20e du quatuor, plusieurs grands compositeurs avaient envoyé des partitions "depuis l'au-delà".  La même mélodie servie selon le style propre aux différents compositeurs: Beethoven, Haydn, Brahms, Wagner, Carlos Gardel, Scott Joplin, John Williams lui-même, qui a fait là un remarquable travail de compositionellis.jpg

Un délicieux pastiche, tout à fait réussi et interprété avec grand soin par les musiciens dans une atmosphère détendue.

Je l'progrSeul.jpgai déjà dit, écrit, et je le répète, le quatuor Alcan est un trésor national, que nous avons la chance d'avoir ici en région et que nous devons chérir, courir entendre et applaudir dès que nous en avons la possibilité: les musiciens, nommons-les (c'est l'ordre de leurs photos, de haut en bas): Laura Andriani, Luc Beauchemin, Nathalie Camus et David Ellis (ces deux-là sont membres de la formation depuis le début) sont extrêmement compétents et parfaitement intégrés, humainement et culturellement, au milieu régional, qu'ils contribuent à animer et à enrichir.

Ils ont l'air heureux, ils nous rendent heureux... et il faut que ça dure!