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28/10/2013

Quand le nez n'en fait qu'à sa tête

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Par curiosité, je suis allée voir Le Nez, de Dmitri Chostakovitch, projeté au cinéma Jonquière  en direct du Metropolitan Opera. Intitulé donc The Nose et chanté en russe avec sous-titres anglais. Je savais que ce serait bien différent des productions habituelles.

Et ce fut vraiment très différent. Musique actuelle, rythmes et pulsations, percussions, dissonances: intéressante par endroits, un peu indigeste à la longue. Heureusement, l'oeuvre a battu un record de brièveté pour ces diffusions: 130 minutes, sans entracte.

C'est une histoire absurde et rigolote inventée à l'origine par Nicolas Gogol: en se réveillant un matin, un homme constate qu'il n'a plus de nez. Pas de blessure, pas de sang, juste l'absence du nez, un vide au milieu du visage.

Le nez est tout simplement parti vivre sa vie (!), se promener dans toute la ville, acquérir un statut social un peu plus élevé que celui de son propriétaire, à qui il est finalement rendu.

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Sur scène, le chanteur Paulo Szot (on l'entend dans un extrait de The Nose sur la vidéo ci-dessus), a son nez bien planté au milieu du visage tout en mimant les tourments d'un Kovalyov qui en serait privé. Fantastique et grotesque, ce nez a pris la taille d'un homme et se déplace sur deux jambes sous deux aspects différents: marionnette en 3D tapissée de papier journal, ou ombre chinoise en deux dimensions: blanc ou noir, donc.

De toute façon, on n'en est pas à une absurdité près dans cette histoire qui pour ainsi dire ne tient pas debout. Elle semble n'avoir pour seul but que de distraire et d'amuser, par ses touches comiques et son sens du ridicule.

Côté plus sérieux, voyons-y l'évocation d'une certaine forme de trouble du comportement, soit l'inévitable schizophrénie induite par les ukases contradictoires qui assaillent le citoyen pris dans l'étau d'un régime totalitaire. C'est le double message, Kafka et Jarry, l'utopie incarnée, la chimère promue au rang de fait avéré, le mensonge au pouvoir.

Comète singulière tentant d'ébranler nos certitudes opératiques, ce Nez paré d'une inquiétante étrangeté nous amuse, nous agace et/ou nous fait réfléchir.

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Les -très nombreux- chanteurs m'ont semblé plutôt bons. Je dis m'ont semblé car je ne connais pas une seule note de la partition et je ne puis dire s'ils chantent juste et ou bien. Cependant j'ai pu apprécier leur jeu, qui est excellent.

La mise en scène signée William Kentridge (qui disait en entrevue avoir conçu le personnage du nez en s'inspirant de son propre appendice, assez imposant merci!) est graphique, agrémentée de textes qui bougent, de dessins animés, d'objets fantaisistes qui saturent les paysages urbains et circonscrivent quelques intérieurs improbables plantés de guingois. Peut-être un peu d'exagération de ce çoté-là, mais tant qu'à faire dans la folie...

Bref, c'était une expérience à vivre, intéressante, réjouissante et troublante. Néanmoins je préfère quand même les bons vieux opéras classique comme Carmen ou Don Giovanni et même, dans la fantaisie, La Flûte enchantée ou Cendrillon.

24/10/2013

Le facteur et les oies blanches

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Un matin: le facteur vient de livrer le courrier chez le voisin d'en face. En redescendant l'escalier, il s'arrête et lève la tête vers le ciel. Je l'observe de ma fenêtre, croyant d'abord qu'il veut ainsi profiter du bref rayon de soleil qui éclaire son visage.

Mais comme il garde les yeux ouverts, je comprends qu'il regarde quelque chose. Sans doute, me dis-je, un voilier de ces oies blanches qui, ces temps-ci, fuient notre hiver et vont retrouver le chaud soleil du Sud.

Mon intuition se confirme quand j'ouvre ma porte pour prendre le courrier: une petite  formation en V traverse le ciel, criaillant et cacardant.

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Trop tard pour photographier celles-là, mais j'en ai croqué d'autres il y a quelques semaines. Au retour d'une expédition à l'Anse-Saint-Jean, j'avais suggéré à mes amis un petit arrêt à la Baie des Ha! Ha!, derrière le Musée du Fjord, où j'avais entendu dire que les oies, bernaches et autres gros oiseaux migrateurs s'arrêtaient en grand nombre.

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En grand nombre en effet. C'était magnifique. Fascinant. Étourdissant. Ça fait rêver, ces foules, ces envolées, ces cris, cette liberté.

Je n'ai pu m'empêcher de jouer avec mon zoom:

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Et j'ai pensé à cette magnifique chanson, Est-ce ainsi que les hommes vivent (Aragon-Léo Ferré), surtout à cause de cette strophe:

Le ciel était gris de nuages
Il y volait des oies sauvages
Qui criaient la mort au passage

Au-dessus des maisons des quais

Je les voyais par la fenêtre

Leur chant triste entrait dans mon être

Et je croyais y reconnaître

Du Rainer Maria Rilke.

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Vous pouvez l'écouter en entier en cliquant sur la photo de Léo Ferré:

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...et en lire toutes les paroles au bout de ce lien.

18/10/2013

Nids chus

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À la fin de l'été, quand mon lilas japonais eut perdu ses feuilles (après une extraordinaire floraison), on vit apparaître ce nid de guêpes, déserté, solitaire, magnifique. Même s'il semblait solidement tressé au bout de sa branche, le vent et la pluie ont eu raison de son attache: il est tombé par terre.

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J'ai alors pu observer de près le travail extraordinaire de ces insectes qui ont produit la matière dont ils ont fait leur maison, tel un papier fin et délicat dans les lacis duquel ils se sont abrités, nourris et reproduits.

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Voici quelques textes sur les nids de guêpes:

 - Quiconque taquine un nid de guêpes doit savoir courir. (Proverbe africain)

 - La calomnie est une guêpe qui vous importune et contre laquelle il ne faut faire aucun mouvement, à moins qu'on ne soit sûr de la tuer, sans quoi elle revient à la charge, plus furieuse que jamais. (Nicolas de Chamfort)



- Nid de guêpes à papier

Je vais bientôt retrouver
avant la nuit, avant le soir
les chemins de terre

fruits rouges
fruits noirs
le garçon que j’ai été

nid de guêpes
nid de papier
tout ce que j’y ai caché

un peu de miel
une piqure
vite oubliée    (Normand Charest)

 

 

nid de guèpes,poème,chute,papierLa fin des saisons révèle souvent des choses cachées jusque-là. Il y a quelques années, quand la neige eut fondu, laissant à nu les branches de ce même lilas japonais, un nid d'oiseau qui avait persisté tout l'hiver m'apparut au printemps, m'inspira ce haïku...

...et chut avant l'été!

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Je laisse à Paul Éluard, un poète que j'aime beaucoup, le dernier mot sur le thème du nid:

Dans Paris, il y a une rue; dans cette rue, il y a une maison; dans cette maison, il y a un escalier; dans cet escalier, il y a une chambre; dans cette chambre, il y a une table; sur cette table, il y a un tapis; sur ce tapis, il y a une cage; dans cette cage, il y a un nid; dans ce nid, il y a un œuf; dans cet œuf, il y a un oiseau.

L’oiseau renversa l’œuf; l’œuf renversa le nid; le nid renversa la cage; la cage renversa le tapis; le tapis renversa la table; la table renversa la chambre; la chambre renversa l'escalier; l'escalier renversa la maison; la maison renversa la rue; la rue renversa la ville de Paris.

14/10/2013

Paysage en mutation

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Je vous présentais il y a peu cette grange blanche que j'avais découverte et photographiée à L'Anse-Saint-Jean (mon billet est ici).

Et voici comment je l'ai retrouvée, deux mois plus tard, perdue dans une profusion de couleurs automnales qui, me semble-t-il, la font vibrer. (Remarquez, à gauche, la petite cascade qui ruisselle dans la montagne).

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Cette fois je l'observais à partir du village (j'étais sur la terrasse du Bistro de l'Anse) qu'elle dissimulait sur la première photo.

En effet je suis retournée hier à l'Anse Saint-Jean (de même qu'à Petit-Saguenay, Rivière-Éternité et Saint-Félix d'Otis) me saouler de couleurs et de paysages, non seulement naturels, mais jetés sur leurs toiles par les peintres qui participaient au symposium Villages en couleurs.

08/10/2013

Beauté abstraite

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L'exposition Chihuly: un univers à couper le souffle est prolongée jusqu'au 27 octobre au Musée des Beaux-Arts de Montréal. Beauté formelle, couleurs pures et vives, transparence, tout cela est fort séduisant.

La forme de ses sculptures de verre évoque celle de nos objets familiers: fleurs, lampes, arbres, ballons. Au moment où j'ai visité l'exposition, mon petit-fils avait adopté un mot: "balou", c'est-à-dire "ballon". Il s'était emparé de ce mot, le premier peut-être qu'il maîtrisait et employait à sa guise, non seulement pour désigner les ballons, mais pour communiquer avec les adultes, s'amuser à les faire réagir, et aussi pour désigner tout objet dont il ne savait pas prononcer le nom.

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"Si Mattéo voyait ça, il dirait bien: balou, balou!", ai-je pensé en voyant cette barque remplie de boules de verre multicolores.

Véritable forêt enchantée aux couleurs chatoyantes, l'univers de Dale Chihuly (photo ci-dessous) m'a cependant laissée un peu froide. Admirative, certes, éprouvant un plaisir sensuel et intellectuel, mais pas vraiment touchée ou remuée.

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Je me suis demandé pourquoi, alors même que j'avais été bouleversée par plusieurs des oeuvres présentées aux Mosaïcultures, visitées lors du même séjour à Montréal.

La réponse me semble-t-il tient à...  la vie. La vie qui palpite dans les sculptures végétales, autant par les sujets représentés, humains, animaux, histoires, légendes, que par le matériau utilisé pour les construire: des plantes vivantes... La vie qui trouve son chemin vers les humains que sont les visiteurs.

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Il y a moins de vie dans l'oeuvre de Chihuly. Du mouvement, certes... mais aucune de ces magnifiques créations de verre ne nous parle de notre monde, de ses activités, de ses aspirations.

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En reconnaissant la forme d'un ballon, d'un arbre, d'une forêt, je suis fascinée par ce jeu de l'esprit, par la beauté de ce que je vois, mais il me manque quelque chose, comme un souffle de vie... qui me relierait à l'auteur de ces extraordinaires créations.

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