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08/07/2010

Star lyrique

MarcHervieux.jpgLa cathédrale de Chicoutimi était bondée mardi pour le concert gratuit donné par le ténor Marc Hervieux (photo) et l'organiste Régis Rousseau. 2000 personnes, peut-être 2500.

Impossible de stationner aux abords du temple. J'ai dû aller sur la rue Jacques-Cartier. Une dame assise sur son balcon m'a demandé ce qui se passait en voyant tous ces gens converger vers la cathédrale. Quand je lui ai dit que c'était un concert de Marc Hervieux, elle a vivement réagi et a dit regretter de ne pouvoir s'y rendre... parce qu'elle venait de se laver la tête!
Ravi d'accueillir tous ces paroissiens d'un soir, le curé Gaétan Thibeault a voulu leur faire plaisir en citant quelques vers de Musset et de Lamartine, notamment ceux-ci:

Lorsque le pélican, lassé d'un long voyage,
Dans les brouillards du soir retourne à ses roseaux,
Ses petits affamés courent sur le rivage
En le voyant au loin s'abattre sur les eaux.



Il a comparé Marc Hervieux au pélican qui va nourrir ses enfants affamés! Il savait sans doute, Monsieur le curé, que plus loin dans le poème, le grand oiseau, après avoir chassé en vain, s'arrache le coeur et l'offre en pâture à ses fils. C'est la métaphore de Musset, qui compare l'oiseau au poète (ou à tout créateur),  celui-ci devant puiser en lui-même ce qu'il donne au public affamé et sacrifier finalement sa vie à son art. N'a-t-il pas écrit aussi:

Ah ! frappe-toi le coeur, c'est là qu'est le génie

(Dans la bibliothèque de mes parents, il y avait entre autres les poésies complètes d'Alfred de Musset, collection la Pléiade. À la suggestion de mon père, j'ai appris par coeur Le Pélican,  de même que Pâle étoile du soir: nous nous amusons encore parfois à les réciter...)

(Si cela vous intéresse, vous trouverez au bout de ce lien le texte complet du poème, incluant les vers qui précèdent et suivent l'épisode du pélican (et qui l'explicitent), plus une analyse du texte conçue pour les candidats au bac français).

Je ne sais pas si Marc Hervieux voit les choses comme ça, mais il puise lui-même dans sa vaste poitrine (et bien sûr dans sa tête, son coeur et son expérience) ce qu'il faut pour remplir tout l'espace sonore de la cathédrale.
J'aime bien pour ma part les exploits de volume chez les chanteurs lyriques, à condition qu'ils n'effacent pas tout le reste (justesse, émotion, diction) et c'est un peu le problème de Marc Hervieux  dans les fortissimi pucciniens: préoccupé de l'exploit, qui j'en conviens est très difficile à réaliser, il néglige parfois les autres aspects du chant. Et le bon peuple applaudit et le traite en rock star...

Je suis ambivalente à l'égard de Marc Hervieux: il a beaucoup de qualités, vocales et dramatiques, mais je trouve qu'il en fait trop et qu'il ne réussit pas tout. En général, il m'énerve...

Son Ave Maria (celui de Schubert), plus retenu, était impeccable. Et il avait un beau programme: surtout des airs sacrés, un peu d'opéra, Maria (du West Side Story de Leonard Bernstein, complètement raté à mon avis).
Excellent choix pour le dernier air: Le Vaisseau d'or, ce merveilleux poème d'Émile Nelligan mis en musique par André Gagnon (pour le drame musical Nelligan).

J'étais assise au premier jubé (où il ne faisait pas trop chaud), donc sous les pieds des artistes (que l'on voyait sur écran pendant la première partie, la plus consistante, qui se passait au deuxième jubé). D'où une certaine distorsion du son qui m'empêche d'évaluer avec justesse certains aspects de la prestation.
Les deux musiciens sont descendus dans le choeur pour la deuxième partie, après un entracte écourté à cause de la chaleur.

Bref, un succès monstre, certes la plus grande foule jamais réunie pour un concert à la cathédrale...

(Dans la prochaine note, je vous parle de la belle prestation de l'organiste Régis Rousseau).

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