Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

14/06/2010

Paul Auster, l'Invisible

InvisibleLivre.jpgJe viens de terminer la lecture de Invisible, le plus récent roman de Paul Auster. Cela aurait pu s'appeler "Un homme", mais le titre était déjà pris (par Philip Roth).
Et peut-être qu'il faudrait dans ce cas dire "Deux hommes", car en réalité Adam Walker, le "héros" de l'histoire, n'existe que par rapport à un autre personnage, Rudolf Born, en quelque sorte son âme damnée. Le premier est un jeune étudiant idéaliste et naïf, l'autre un personnage ambigu, qui inspire fascination et inquiétude.
Un lien se noue entre les deux hommes, qui sera brisé à la suite d'un événement tragique. Horrifié par le geste agressif de Born, Walker tente de le dénoncer, d'abord à la police, puis à d'autres personnes qui le connaissent, et finit par quitter les États-Unis pour l'Europe, croyant ainsi se libérer de son fardeau. Quelques liaisons avec des femmes, une poursuite, des interventions policières, des rencontres émaillent aussi la narration et étendent le tissu temporel autour de l'année de référence, 1967.
Ce que j'ai surtout aimé de ce livre, c'est sa structure, qui s'appuie sur une technique narrative originale, sa maîtrise des procédés littéraires, les références à l'histoire ancienne ou moderne qui le relient au monde réel. Paul Auster, un auteur que j'apprécie et dont j'ai lu presque tous les livres, est un as à ce chapitre.
Cette histoire prend la forme d'un manuscrit qu'Adam Walker, atteint d'une grave maladie, fait  parvenir en plusieurs étapes à Jim, un ancien vague camarade de promotion.
Mais le fait qu'il s'agisse d'un manuscrit n'est pas dévoilé d'emblée: le lecteur l'apprend après avoir lu le premier chapitre. La responsabilité d'écrire le récit se transmet alors du personnage principal au personnage secondaire, puis à un troisième personnage, on passe du "je" au "tu", puis au "il".  Le suspense se tisse et se désamorce, tandis qu'Adam Walker est de moins en moins présent à mesure que faiblissent ses forces... il devient invisible.paulAuster.jpg
Comme toujours chez Paul Auster, les personnages sont des êtres de mots et non de chair: tissés dans et par l'écriture, ils conservent leurs zones d'ombre, se défilent et se délitent.

 

Tout passe

l'espace

efface

le bruit

comme dirait Victor Hugo.

 

Des indices sèment le doute chez le lecteur et l'incitent à tenter d'établir une hiérarchie des événements selon leur réalité, leur probabilité, ou leur impossibilité (par exemple ceux qui sont imaginés par un personnage). Il est même écrit en toutes lettres, quelque part au milieu du livre, que les noms de personnes et de lieux ont été changés... ce qui est un comble puisqu'il s'agit d'une fiction!
Ceci dit, ces incertitudes ne sont pas frustrantes pour le lecteur, du moins pas pour moi: l'histoire finit par se tenir, grâce à un travail littéraire habile et fascinant.

J'ai donc beaucoup aimé ce roman de Paul Auster: agréable à lire, il fait réfléchir et, comme les personnages et les événements qu'il construit sous nos yeux, comme toute oeuvre d'art d'ailleurs, il conserve sa part de mystère.

Commentaires

Pourquoi ne s'arrêter qu'au génie des auteurs, alors qu'il y a des lecteurs aussi géniaux que toi, possédant cette grande qualité de donner avec générosité et ouverture ce qu'ils viennent de recevoir?

Écrit par : Andrée | 27/06/2010

Les commentaires sont fermés.